Club de l'Histoire de l'Anesthésie et de la Réanimation

Abords veineux et cathétérismes

Expo 2000 - Congrès de la SFAR - Paris

Viard Dominique , Cazalaà Jean-Bernard

date de publication : septembre 2000


  mise en ligne : jeudi 8 mai 2008




TECHNIQUES

LES VOIES PERIPHERIQUES

Jusqu’au milieu du XIXème siècle, les seules injections intra-veineuses employées sont des injections uniques ou espacées dans le temps et de courte durée.
A partir du milieu du XIXème siècle, apparition des injections intraveineuses prolongées ou répétées. Trois méthodes sont alors employées jusqu’en 1945 :
1. Ponction directe de la veine à chaque injection.
2. Perfusion à l’aiguille, ou plus tard avec une canule métallique, laissée en place.
3. Dénudation de la veine en cas de calibre insuffisant, mais la veine est ligaturée et par conséquent détruite définitivement.
En 1945, MEYERS applique à la perfusion intraveineuse, la méthode de cathétérisation intramusculaire décrite par Mc QUIGG en 1945 : il met en place un cathéter en "vinelite" au travers d’un trocart. En 1947, BECART décrit une technique similaire avec une sonde urétérale n°5 introduite dans une canule à transfusion.
En 1949, DUFFY publie une étude sur 72 cas de réanimation post-opératoire périphérique, réalisée au moyen de cathéter veineux en polyéthylène. Les voies employées sont essentiellement la voie jugulaire avec 1 cas de maintien pendant 39 jours, et la voie fémorale avec 1 cas de maintien pendant 35 jours.

LES VOIES CENTRALES

Parallèlement au développement des perfusions, un contrôle de l’hémodynamique s’avère indispensable.
Le cathétérisme du coeur droit est décrit au XIXème siècle, chez le chien, par Claude BERNARD   dans ses "Leçons de physiologie opératoire" faisant suite aux expériences de CHAUVEAU et MAREY. La voie employée est la jugulaire externe.
MORITZ et VON TAROBA, en 1910, réalisent la première mesure de PVC chez l’homme par voie sanglante en utilisant une veine du pli du coude.
La plupart des voies d’abord centrales sont décrites avant 1960 :

 Veine JUGULAIRE EXTERNE : en 1949, les publications d’ALLUAUME en France et de DUFFY aux Etats-Unis mettent en évidence l’intérét de cette voie.
 Veine SOUS-CLAVIERE : en 1952, AUBANIAC décrit sa ponction à l’aiguille par voie sous-claviculaire. En 1955, KILLICHAN décrit la voie d’abord sus-claviculaire qui n’a pas beaucoup de succès contrairement à la technique décrite par YOFFFA en 1965.
 Veines BASILIQUE et CEPHALIQUE sont également beaucoup employées début des cathétérismes centraux.
 Veine FEMORALE : en 1958, elle est utilisée par MONCRIEFF qui insiste sur les risques thrombo-phlébitiques.
 Veine JUGULAIRE INTERNE : décrite en 1966 par HERMOSHURA, elle demeure peu employée jusqu’en 1970
date à laquelle les travaux de JERNIGAN en font la voie d’abord centrale de première intention vu la moins grande incidence des complications.

COMPLICATIONS

Curieusement, si les complications des injections intra-veineuses sont apparues aux différents opérateurs très tôt dans l’utilisation de la méthode, nombres n’ont pas été reconnues comme telles et par conséquent la plupart étaient le plus souvent laissées pour compte, voire totalement niées.

Complications mécaniques

EMBOLIE GAZEUSE

Très vite, les complications dues à l’entrée d’air massive dans la circulation sanguine sont décrites comme redoutables. En 1667, Francisco REDI note que les animaux meurent rapidement quand une veine est ouverte et que l’air entre dans celle-ci. En 1839, la publication des travaux de Jean Zelema AMUSSAT, chirurgien   de l’armée napoléonienne, démontre les mécanismes de l’embolie gazeuse. Quelque soit la technique employée, la pénétration d’air dans les veines sera un souci constant chez les opérateurs. Aussi si sa fréquence est faible dans les injections périphériques, elle connaîtra une recrudescence majeure lors des premiers cathétérismes centraux.

BLESSURE de la veine, PERFUSION EXTRAVEINEUSE

sont très fréquentes avant l’arrivée des cathéters intraveineux.

Complications infectieuses

En 1778, REGNAUDOT, médecin à la Guadeloupe, observe "qu’en général les injections donnent d’abord un frisson, une élévation de température" ! !
LADEVI-ROCHE conclut, en 1870, que "ces accidents partout où ils ont été mentionnés, se sont toujours dissipés promptement et n’ont été suivis d’aucune complication fâcheuse".
Ce phénomène est donc banalisé par tous les opérateurs, de méme que les lymphangites au niveau de l’injection, pour deux raisons : d’une part, la véritable cause, à savoir l’infection, ne sera élucidée qu’au milieu du XIXème siècle avec les travaux de PASTEUR  , d’autre part ce phénomène est très connu des chirurgiens de l’époque qui pratiquent de multiples saignées. En effet les mesures d’asepsie étaient aussi inexistantes dans l’une et l’autre méthode.

Leur traitement est simple bien qu’inconstamment efficace. COINDET, médecin à Genève, en 1822, décrit après une injection d’opium "une inflammation de la veine qui cède au traitement par l’application de glace et de sangsues".

Les mesures d’asepsie mises au point par SEMMELWEISS en 1846 (lavage des mains) et par PASTEUR   en 1877 (stérilisation des instruments) seront déterminantes.

L’avènement des cathéters, en particulier centraux, apportera également son lot de complications infectieuses plus ou moins graves. Notamment très vite, la voie fémorale est décrite comme étant à très haut risque infectieux.

Complications thrombotiques

Reconnues par certains opérateurs, elles sont peu prises en compte jusqu’à la fin du XIXème siècle.

Ainsi LADEVI-ROCHE dans sa thèse sur l’histoire des perfusions en 1870, nie la survenue d’éventuelle phlébite, ayant pour point de départ le site d’injection et conclut : "on ne peut que passer outre devant un tel argument".

Leur reconnaissance, le traitement par les héparines et l’emploi de matériaux mieux supportés par l’organisme, en diminuera les conséquences.