mise en ligne : lundi 17 mars 2008
Il convient, avant de parler d’anesthésie péridurale, de situer l’environnement matériel dans la seconde moitié du l9ème siècle.
En 1853, Pravaz met au point, avec Charrière, la première seringue médicale, précise et facile d’utilisation grâce à un système à vis. De plus, cette seringue a subi des essais en laboratoire mais l’injection se fait toujours au travers d’un trocart après incision de la peau.
Claude Bernard , au début des années 1860, utilise dans ses expérimentations l’aiguille creuse dont il biseaute l’extrémité pour faciliter la pénétration.
En 1870, apparait la seringue en verre qui, par la suite, sera graduée avec une extrémité en forme de cône tronqué pour pouvoir y adapter une aiguille. Luer, quelques années plus tard, y ajoutera un cran de façon à fixer correctement l’aiguille.
Enfin, la cocaine est un analgésique couramment utilisé, de même que la morphine.
En 1855, Corning, un neurologue américain, publie le résultat d’expériences d’injections périvertébrales. Le travail de ce médecin est un chef d’oeuvre de médiocrité. à la limite de l’escroquerie.
C’est dire si la qualité des résultats peut être mise en doute. Pourtant, certains continuent à penser qu’il est le premier à avoir réalisé des injections péridurale et intradurale (Rappelons que la technique de la ponction lombaire a été décrite par Quincke en 1891). Cela est possible mais serait alors le fruit du hasard étant donné l’absence totale de méthodologie. Il est aussi permis de penser que si de telles injections avaient été pratiquées chez l’homme, Corning aurait eu des accidents étant donné les effets produits, en particulier par la cocaine en intradural.
Sicard et Cathelin sont à l’opposé de ce bricoleur dangereux et malhonnête.
Commencons par le plus jeune des deux, Cathelin, né en 1873, interne en neurologie dans le service de chirurgie de l’hôpital Tenon. Il est au courant des travaux de Tuffier présentés à la Société de Biologie en l 900 et de son livre publié la même année. ll décide de consacré sa thèse à la voie rachidienne. Le 23 janvier l 901, il pratique, à l’amphithéâtre, des coupes de rachis d’un cadavre et observe l’existence d’un espace entre les membranes périmédullaires et le périoste intravertébral. ll décide alors de pratiquer des coupes vertébrales de chien et s’adresse pour cela au Pr Richet qui dirige le laboratoire d’anatomie. Il retrouve l’espace étroit observé entre le périoste et la duremère.
Deux jours plus tard, le 25 janvier 1901, Cathelin essaie de ponctionner cet espace sur un cadavre de chien. Ses essais sont des échecs ou aboutissent à des ponctions du fourreau mébullaire. Il décide alors d’essayer au niveau du canal sacré mais effectue auparavant une coupe du sacrum, qui lui permet de mettre en évidence la continuité des espaces épidurai lombaire et extradural sacré.
Le jour suivant, avec une aiguille longue et fine, Cathelin réalise, chez un chien vivant, I’injection de 30 mg de chlortydrate de cocaine après avoir vérifié qu’il n’y avait pas de retour de LCR. Il obtient chez ce chien de 7 kgs une anesthésie complète du train postérieur et incomplète du train antérieur. Reprenant le même animal, quatre jours plus tard, le 2 février 1901, il injecte la même dose de cocaine, par la même voie, avec les mêmes résultats. Il injecte alors, par l’aiguille laissée en place, de l’encre de chine et sacrifie l’animal dix jours plus tard. L’espace péridural et épidural est coloré en noir jusqu’à la région cervicale.
La preuve était alors faite que l’on pouvait obtenir la même analgésie par voie rachidienne sans risque pour la moelle.
Les essais sur des malades bénéficiant d’un traitement chirurgical d’une hernie inguinale furent des <
Pendant la même période, Sicard, son ainé de un an, fit les mêmes constatations.
Leurs noms sont indissociables et peu importe qui fut le premier à découvrir la voie caudale. Il n’en reste pas moins vrai que ces deux médecins, I’un chirurgien , I’autre neurologue, ont réalisé des travaux réellement scientifiques, contrairement à leur confrère d’outre-Atlantique.
Il en fallait, toutefois, plus pour que la péridurale acquiert ses lettres de noblesse. On retrouve parmi ceux qui y ont contribué des noms comme ceux de Sebrecht, Macintosh et, surtout, Dogliotti.